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Le développement de l'amour-bienveillant (metta bhavana)
par
Vénérable Sujiva
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Chapitre 1 - Metta Bhavana
Une bonne image pour représenter metta (l'amour-bienveillant) est celle d'une mère berçant son bébé pour l'endormir. L'endormissement du bébé est le résultat du bercement. Je me souviens encore de la sensation agréable quand ma mère me berçait pour m'endormir. Il y a aussi beaucoup de joie en nous lorsque nous nous occupons d'un ami de façon désintéressée. Tout cela, c'est l'amour bienveillant et ses résultats.
Dans les textes, metta se caractérise par la volonté de promouvoir le bien-être. La bonne volonté, l'amitié et l'amour bienveillant sont parmi les mots utilisés pour décrire cet état mental. Il n'y a pas de meilleure façon de le connaître que de l'observer quand il se manifeste dans son esprit ou dans celui des autres. C'est un état d'esprit totalement altruiste et pur qui bénéficie à celui qui le pratique, et aux autres, dans le moment présent et par la suite.
Le développement de cet état d'esprit est appelé bhavana, traduit habituellement par méditation. Quand nous le cultivons, il devient fort, puissant et utile. Il nous apporte une paix et un bonheur abondant, profond et intense.
Le développement de metta implique les aspects suivants :
1. La concentration de metta. Concentré, metta devient fort et puissant.
2. Metta est cultivé pour être donné à tout le monde. Il est flexible, adaptable, universel et sans limite.
3. Quand cette force potentielle est devenue puissante, nous pouvons l'utiliser pour produire des merveilles et pour améliorer la vie de tous.Pour réaliser cela efficacement, nous avons besoin d'une méthode. La maîtriser demande de la patience. Mais avec de l'expérience, nous nous améliorons.
Dans le bouddhisme, metta est un état de l'esprit. Son objet est "l'être aimable". C'est un état dans lequel on se trouve lorsque l'on veut améliorer le bien-être de l'être aimable. Dans les enseignements bouddhistes, la doctrine d'anatta, ou du non-soi, occupe une position de première importance. Présenté ainsi, cela pourrait sembler contradictoire. Mais c'est parce qu'il existe deux types de vérités : conventionnelles (sammutti) et ultimes (paramattha). Les vérités conventionnelles sont conceptuelles et vraies seulement au niveau conventionnel. Considérées d'un point de vue ultime (c'est-à-dire dans un esprit libéré de concepts et d'idées), elles n'existent pas. Elles sont comme des ombres projetées par les réalités. Par conséquent, la " personne " existe seulement par convention. De façon ultime, " elle " peut être vécue comme des processus mentaux et matériels. Si vous percevez les choses sous cet angle, vous les voyez telles qu'elles sont vraiment, ce qui est la compréhension directe (vipassana). Développer cette vision directe de la réalité, c'est pratiquer la méditation de la compréhension directe (vipassana bhavana). Dans ces moments, nous ne pouvons cultiver l'amour bienveillant car la nature de l'objet est différent. Par contre, quand nous retournons au niveau des réalités conventionnelles ou revenons aux objets conceptuels, nous pouvons retrouver metta. Pour cette raison, vipassana est, comparativement, supérieur et plus profond. Il libère complètement des souffrances du samsara (cycle de naissances et morts).
Cependant, metta ne doit pas être sous-estimé, même s'il comporte des limites. La plupart d'entre nous aurons besoin de beaucoup de temps avant d'avoir achevé le développement de la compréhension directe. Et même après, metta aura encore son importance. Même les Bouddhas ne sont pas toujours sans objets conceptuels. Les concepts apparaissent avec les formations et les processus mentaux.
Dans le discours à Subha, le Bouddha répond, entre autres, aux questions qui lui sont posées sur les raisons d'une longue vie. D'après ses réponses, nous découvrons que les résultats kammiques qui conduisent à une longue vie, à une bonne santé, à la beauté, à l'abondance, à une naissance noble sont attribués à des actes découlant de l'amour bienveillant, de la compassion et de la joie altruiste.
Aussi, les quatre états sublimes (Bramavihara, c'est-à-dire l'amour bienveillant, la compassion, la joie altruiste et l'équanimité) agissent comme un baume apaisant pour ceux qui sont encore dans le cycle de naissance et de mort.En outre, nous pouvons aussi voir metta comme un moyen efficace pour :
1. Vaincre la colère, car c'est l'opposé de cet état mental violent et destructeur.
2. Bâtir la concentration nécessaire au développement de la compréhension directe, parce qu'avec metta notre esprit se concentre rapidement.
3. Établir une relation saine avec chaque être vivant, une condition si importante pour une famille, une société et un monde heureux.Nous pouvons donc voir que metta bhavana devrait être pratiqué par tout le monde jusqu'à un certain point. Sans cela, non seulement nous tendons à échouer dans nos relations personnelles et sociales, mais c'est aussi un grand désavantage quand nous sommes impliqués dans une pratique spirituelle.